Magnifique bien que peu flatteur pour le modèle, ce portrait de Jean Cocteau fut peint au printemps 1916 par Modigliani dans l’atelier de Moïse Kisling où se réunissaient les amis du peintre.
Picasso avait présenté Cocteau à Modigliani ; Blaise Cendrars qui fut un ami proche de Kisling circule dans ces parages. Autre témoin de ces croisements dans le quartier de Montparnasse, un poète plus discret, Pierre Reverdy, raconte dans le Voleur de Talan que pendant la pose, l’incorrigible Cocteau « parlait sans arrêt, sa voix était aussi forte que la pluie qui frappait la vitre ». Personne ne prêtait véritablement attention à ses propos. Prétextant que le tableau n’entrerait pas dans le taxi qu’il avait appelé pour rentrer chez lui, Cocteau le laissa sur place et ne vint jamais le chercher. Non sans l’avoir généreusement payé, dit-on, la modique somme de cinq francs.
Plus tard, au cours des années cinquante, Cocteau, peu rancunier, fut sensible à la plus-value symbolique que lui offrait cette toile signée par un grand artiste de son siècle. Bon prince, il écrivit dans un courrier : « Cela ne me ressemble pas, mais çà ressemble à du Modigliani, ce qui est mieux ».
Cocteau par Modigliani
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