Archives de la catégorie ‘Mémoire’

Une lettre de Léautaud à Céline

Publié le 26 avr 2019 — par Sam
Catégories Mémoire

Leautaud

Qu’y avait-il de commun entre Céline et Léautaud ? Le talent d’écrivain d’abord – encore que dans le cas du premier le terme de génie soit souvent avancé; la dégaine de clochard ensuite, et nul n’ignore que sur la fin de sa vie l’ermite de Meudon avait adopté la mise déguenillée du solitaire de Fontenay-aux-Roses, ce qui tendrait à confirmer leur semblable mépris des conventions et une certaine misanthropie.
Surtout, ce qui les réunit c’est leur amour des chats. Voici à ce propos une anecdote rapportée par Frédéric Vitoux dans son excellent Bébert, le chat de Louis Ferdinand Céline. En juin 1944, Céline décide de gagner le Danemark mais il lui faut d’abord se rendre en Allemagne pour obtenir visas et autres sauf-conduits… A-t-il hésité alors à emmener Bébert ? Selon Frédéric Vitoux, il reçoit à cette époque un mot de Paul Léautaud : « Vous allez sans doute être liquidé à la Libération, lui dit-il en substance, et vous l’aurez bien mérité, je ne verserai pas une larme, mais vous pourrez mourir en paix, sachez que je suis prêt à recueillir Bébert qui seul m’importe. »
Bien que sensible à cette proposition sans ambages, Céline ne lui a pas donné suite. Quant à la lettre ainsi résumée, elle a disparu dans l’incendie du pavillon de Céline à Meudon, le 23 mai 1968.

In Memoriam : André Francis et Jacques Loussier

Publié le 16 mar 2019 — par Sam
Catégories Mémoire

En moins d’un mois*, le monde du jazz a perdu deux grandes figures françaises, le journaliste André Francis et le pianiste Jacques Loussier. Hommage à ces deux personnalités qui ont contribué à notre passion pour cette musique.

Durant 50 ans, jusqu’à sa décision de prendre sa retraite en 1996, André Francis a été au rendez-vous de tous les jazz, à la radio et à la télévision. Ses émissions s’appelaient Jazz sur Scène ou Jazz vivant : des titres en guise d’autoportrait pour celui qui aura été tout simplement Monsieur Jazz sur les antennes du service public. France Inter, France Musique, France Culture, bien sûr, mais aussi à la télévision.

André_Francis


La passion le conduisit à organiser des concerts dès 1947, il avait 22 ans… Ce sera une vocation inlassable. À côté de la programmation des concerts de jazz à l’ORTF et Radio France (les notes manuscrites de ses carnets sont toujours un outil de première main sur le contenu des concerts), il programmera le légendaire et turbulent festival de jazz de Chateauvallon ou le festival de jazz de Paris qui vit passer tous les monstres sacrés du jazz dans les années 80.
Entre temps, André Francis participera à la création de l’Académie du Jazz avec Jean Cocteau en 1955, à celle du Concours National de Jazz de La Défense en 1977 et sera le premier président de l’Orchestre National de Jazz en 1986.
Responsable du Bureau du jazz de Radio France à partir de 1964, il aura programmé près de 10 000 formations au cour des années, soit en enregistrant les musiciens en studio, soit en diffusant leurs concerts en direct ou en différé depuis une salle ou un festival.

Considéré pour sa part comme un musicien inclassable, Jacques Loussier était réputé notamment pour ses adaptations jazz de Jean-Sébastien Bach. Il a dirigé le trio « Play Bach », fondé en 1959 avec le contrebassiste Pierre Michelot (disparu en 2005) et le batteur Christian Garros (décédé en 1988), et a mené une carrière internationale riche de 3.000 concerts et plus de 7 millions d’albums vendus.Mais cet artiste en marge des circuits traditioannels du jazz s’est aussi illustré en tant que membre d’orchestres de music-hall, et compositeur de plus d’une centaine de morceaux pour le cinéma et la télévision, dont le célèbre générique de la série culte Thierry La Fronde .

French pianist Jacques Loussier performs


« Jacques Loussier a eu cette idée de génie à l’époque d’adapter Bach en jazz, et il a eu du succès dans le monde entier. La musique de Jean-Sébastien Bach swingue beaucoup et c’est peut être notre premier jazzman« , a expliqué  à l’AFP Pascal Anquetil, journaliste à Jazz Magazine. Outre l’oeuvre de Jean-Sébastien Bach, il avait également adapté d’autres grands maîtres de la musique classique comme Vivaldi, Ravel, Satie, Debussy ou Schumann. Son dernier disque, « My personal favourites », était sorti en 2014 chez Telarc, à l’occasion de ses 80 ans.
Jacques Loussier, né en octobre 1934 à Angers, avait également créé un studio d’enregistrement à Miraval, dans le sud de la France, où travaillèrent notamment Pink Floyd et The Cure. [dépêche AFP]

* André Francis s’est éteint le 12 février 2019 à l’âge de 94 ans, Jacques Loussier le 5 mars 2019 à 84 ans.

James Dean jeune à jamais

Publié le 09 fév 2019 — par Sam
Catégories Mémoire

Il aurait eu 90 ans le 8 février 2021. Il a trouvé la mort à l’âge de 24 ans sur la route de Salinas (Californie), au volant de sa Porsche 550 Spyder affectueusement surnommée Little Bastard.
Ce jour-là, passionné d’automobile, James Dean compte s’aligner au départ d’une course, malgré l’interdiction par contrat des producteurs de ses derniers films. Parti tôt de son domicile à Los Angeles, avec pour passager son mécanicien Rolf Wutherich, il est arrêté par un contrôle de police et reçoit une contravention pour excès de vitesse. Il repart, toujours en roulant assez vite, de peur d’arriver en retard à la course.
Après avoir roulé presque 4 heures, James Dean traverse la petite ville de Cholame. À ce moment-là, un étudiant, Donald Turnupseed, arrive de la route 41 au volant d’une Ford Sedan. James Dean, lui, est sur la US Highway 466. La Ford Sedan coupe la priorité à la Porsche 550 qui arrive à bonne allure mais sans plus (90 km/h selon les experts). James Dean voit l’autre voiture, mais ne s’arrête pas, il ne freine même pas ; il tente de la contourner, sans succès. Les deux voitures se percutent, la Porsche est fracassée côté conducteur.
James Dean meurt sur le coup. Son mécanicien, après avoir heurté le tableau de bord, est projeté hors de la voiture. Il décèdera en 1981, après avoir connu plusieurs tentatives de suicide. L’autre conducteur s’en sort avec quelques hématomes. La mort de l’acteur fut annoncée à 17h59 exactement, il était âgé de 24 ans. En cette année 2015, il aurait donc 84 ans. Mais pour ses fans d’hier et d’aujourd’hui, devenu un acteur mythique, il reste éternellement jeune. Quant à sa voiture, l’histoire n’en reste pas là : Little Bastard devait aussi entrer dans la légende à la suite d’une série de faits troublants évoqués ici.

L’embarquement de Madame Royale

Publié le 24 août 2018 — par Sam
Catégories Mémoire

Elle était la fille aînée de Louis XVI et de Marie-Antoinette. Marie-Thérèse Charlotte (1778-1851), dite la Dauphine ou Madame Royale, fut la seule rescapée de la prison du Temple où elle demeura enfermée pendant trois ans. Elle n’apprendra la mort de ses parents et de son jeune frère Louis-Charles que lors de sa libération, en 1795, par le gouvernement du Directoire.

Embarquement  de la duchesse d'Angoulême

Embarquement de la duchesse d'Angoulême à Pauillac - Jean-Antoine Gros, 1818.

Plus tard, l’orpheline du Temple deviendra une figure majeure de la reconquête du royaume par son oncle le comte de Provence, futur Louis XVIII, dont elle épousera le fils, le duc d’Angoulême. Durant l’Empire, elle les suivra en exil en Russie et en Pologne.
Au lendemain de l’abdication de Napoléon survient la Restauration. Nombre de monarchistes préconisent l’accession au trône de la dernière enfant du roi martyr. Pour Lamartine, “la duchesse d’Angoulême était le sentiment dans la cause de la Restauration”. Et Napoléon lui-même la considérait comme “le seul homme de la famille”, au détriment du prétendant à la couronne. Mais, en vertu de la loi salique, c’est bien celui-ci qui montera sur le trône. Jusqu’au retour de l’Aigle et les Cents jours. D’où un nouvel exil, en Angleterre cette fois.Dans la nuit du 1er au 2 avril 1815, à l’approche des troupes napoléoniennes dans la région de Bordeaux, Marie-Thérèse embarque à bord d’une frégate anglaise amarrée dans l’estuaire de la Gironde. Un épisode que le peintre Antoine-Jean Gros a immortalisé dans cette vaste composition intitulée L’Embarquement de la duchesse d’Angoulême à Pauillac. Marie-Thérèse, entourée de plusieurs fièdles, était alors âgée de 37 ans. Ironie de l’Histoire, au même endroit 37 ans plus tôt (le 25 mars 1778), le marquis de Lafayette s’était embarqué à bord de la Victoire afin de rallier les Amériques.